La Lettre d'infos n°39

Publié le 6 avril 2020
Sommaire

Infos des lieux de vie


  • A Calais, entre 800 et 1000 personnes (sur)vivent sur les différentes jungles, et n’ont pas été confinées. Dès le début de la crise sanitaire, et au fur et à mesure, plusieurs associations ont dû se retirer, notamment Refugee Community Kitchen dès le 24 mars, ne laissant que Salam et la Vie active pour les distributions alimentaires. Les expulsions forcées des campements se sont poursuivies malgré la crise sanitaire, et ce alors même que les forces de police elles-mêmes se retiraient et demandaient à arrêter les expulsions quotidiennes ! Les violences policières se sont accrues sur les personnes exilées ; les forces de l’ordre ont sanctionné plusieurs associations par des contraventions, pour l’une d’elles, la police indiquant que les personnes exilées « n’étaient pas assez vulnérables » pour que les bénévoles puissent utiliser l’attestation dérogatoire à ce titre. Au niveau des autorités préfectorales, une solution sur la base du volontariat des personnes exilées a été mise en place une première fois le vendredi 27 mars (86 personnes mises à l’abri), et le lundi 6 avril, une opération similaire a eu lieu sur le même format. Côté réponse sanitaire, la Croix Rouge, Médecins du Monde et la PASS participent au mieux à sa coordination : des maraudes conjointes sont mises en place pour informer, sensibiliser et orienter les personnes exilées.

  • A Cherbourg, une situation ubuesque et anxiogène pour une vingtaine de personnes exilées.On leur demande de respecter des consignes sanitaires (lavage des mains, distanciation sociale, prise de température) lorsqu’elles se posent de 13h à 17h  au « Becquerel », lieu ouvert par le CCAS et géré par Itinérance. Ensuite elles repartent dans un petit camp, serrées autour d’un feu de bois pour se réchauffer, boire le thé et dorment à deux ou trois dans des tentes sans accès direct à l’eau, dans une promiscuité intolérable. Silence assourdissant des services de l’Etat concernant la mise à l’abri des personnes exilées.
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  • A Dieppe, il n’y a a priori plus de squat ou de campement depuis un moment. Les personnes exilées de passage, principalement kurdes, ne viennent plus que de manière sporadique, par petits groupes, et repartent après quelques jours. Du côté de l’association Itinérance Dieppe, l’action se poursuit même si elle a également été adaptée au contexte d’épidémie : leur local d’accueil reste fermé, mais une permanence téléphonique a été mise en place pour pouvoir répondre à toute demande. Si besoin, un.e bénévole peut se déplacer au local pour venir donner des denrées d’urgence. Par ailleurs, l’association a informé et distribué des attestations de déplacement à tous les jeunes majeurs isolés dans leurs hébergements (une douzaine actuellement).

  • A Grande Synthe, environ 600 personnes (sur)vivent dans différents lieux, en majorité des hangars désaffectés particulièrement dangereux, et n’ont pas été confinées. Le retrait des associations, dès le début de la crise sanitaire, a des conséquences importantes, en particulier sur le volet alimentaire. L’accès aux supermarchés ou services publics existant est rendu difficile du fait du confinement général, et de l’obligation de présenter des attestations de déplacement dérogatoire. La préfecture des Hauts de France avait annoncé que le Secours populaire et la Croix rouge, en tant qu’associations mandatées, assureraient les distributions alimentaires et un accès sanitaire, mais ces associations n’étaient pas prêtes pour assurer un tel relais de la coordination habituelle associative. La Protection civile prend la température des personnes sur les lieux de vie, et les personnes exilées présentant des symptômes sont envoyées vers des « centres de confinement » ouverts sur le département, coordonnés par la Croix rouge. Des flyers traduits en sorani ont été distribués afin de préparer une mise à l’abri sur la base du volontariat des personnes, et une première opération sur ce format a eu lieu le lundi 6 avril.

  • A Lille, une quinzaine de mineurs étrangers sont hébergés dans un bâtiment  à Wattignies depuis 2018 et une autre quinzaine sont accueillis depuis le mois d’octobre 2019 dans l’ancien séminaire de Lille. Ils sont accompagnés par le centre de la Réconciliation et la Pastorale des Migrants. Ils sont actuellement confinés dans ces lieux. Mais une quarantaine de jeunes sont toujours dans la rue. Le 115 devrait ouvrir des structures.

  • Du côté de Norrent Fontes, les personnes de Saint Hilaire Cottes sont dans des familles depuis le début du confinement. Dans le PRAHDA de Fouquière les Béthune, les personnes s’ennuient beaucoup mais il n’y a pas de malade pour le moment. Pas de masques ou de gel hydro-alcoolique. Les personnes assignées à résidence continuent de devoir aller signer au poste de police. Pour les personnes dublinées ayant rendez vous en préfecture, c’est un peu flou car la préfecture est fermée. Les trois personnes du camp de Quernes ont décidé de rester dans le petit bois. Elles ont reçu la visite des gendarmes mais pas d’autres contacts avec les autorités.

  • A Ouistreham, la soixantaine de personnes exilées souvent originaires du Soudan et  présentes sur la ville sont actuellement hébergées dans un centre de vacances, géré pour l’occasion par la Croix Rouge, à une petite vingtaine de kilomètres de Ouistreham. La préfecture du Calvados a proposé cette solution d’hébergement dans le cadre du dispositif de confinement des personnes fragiles.

  • A Steenvoorde, l’accueil de jour, géré par l’association Terre d’Errance Steenvoorde, reste désormais également ouvert la nuit. Les personnes exilées y seraient ainsi confinées 24h/24h, à la demande des autorités.

Infos des assos


  • Des nouvelles de l’association Maison Sésame : dans ce deuxième livret des Sésamettes l’association présente ses avancées des derniers mois de décembre, janvier et février avec ses actions, ses nouveaux questionnements, mais aussi ses futurs projets. Depuis l’annonce du confinement l’équipe de la Maison Sésame et les personnes vulnérables vivent ensemble. Elles préparent le jardin et continuent de construire ce lieu de vie.
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  • Itinérance Cherbourg a fêté en janvier les 10 ans de ses cours d’alphabétisation. 150 personnes, étudiants, professeurs et bénévoles, ont partagé ce moment. « Les débuts étaient difficiles car nous avions peu de place et de plus en plus d’étudiants de nationalité multiples » se remémore Josiane Noblet responsable de la commission alphabétisation au sein de l’association. Depuis 3 ans, la municipalité a attribué à Itinérance des locaux en centre-ville dans une école désaffectée. Les personnes qui suivent les cours, quatre jours par semaine de 14h à 15h30 viennent du monde entier. L’accueil y est inconditionnel, les étudiants viennent de nombreux pays (en 2017, 46 nationalités). Une quarantaine de professeurs se relaient pour assurer les cours en fonction du niveau des étudiants.
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Infos de la PSM


  • L’assemblée générale de la PSM qui devait avoir lieu le samedi 28 Mars après-midi à Grande Synthe a été annulée du fait de la crise sanitaire. La PSM vous tiendra informée dès que possible sur la tenue de cette AG en 2020.

  • Depuis le 19 mars, face à la crise sanitaire qui précarise d’autant plus les sans-abri à la frontière franco-britannique, une campagne sur les réseaux sociaux mobilise les forces du réseau PSM ! Sous le hashtag #Confineesdanslarue sur Facebook et Twitter, le but est d’interpeller les citoyen.ne.s et de leur demander d’agir de chez eux avec ce leitmotiv : « Solidaires et uni.e.s, nous restons chez nous. Pourtant, des milliers de personnes sont #confinéesdanslarue . Nous sommes confiné.e.s, mais NOUS POUVONS AGIR. » Rendez-vous sur les réseaux sociaux pour voir la suite, et participer à la campagne avec vos initiatives toutes neuves à nous partager.

Envie d’agir


  • Mais pour rester chez soi, il faut un chez soi ! Droit d’Urgence a lancé cette pétition qui s’adresse au Premier Ministre.

  • Interpellez votre Préfet sur la situation des personnes étrangères ! Une proposition faite par les Etats Généraux des Migrations parce que certains lieux d’enfermement (centres de rétention administratives, zones d’attente, etc.) sont encore en activité malgré la suspension de la majorité des liaisons aériennes, les voies de recours contre les décisions prises à l’encontre des personnes exilées ne sont pas toutes suspendues, et la prise en charge et mise à l’abri des personnes les plus vulnérables n’est pas assurée pour toutes et tous. Le groupe de facilitation des EGM vous invite à alerter vos préfectures sur la situation des personnes étrangères et à proposer des mesures concrètes de protection. Plus d’infos et une proposition de lettre ici.
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Belles échappées


  • Souffle, souffle, souffle Dragon ! A écouter ici

  • Des lectures : c’est le moment si vous ne les avez pas encore faites !
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  • « Entre deux mondes  » de Olivier Norek : Fuyant un régime sanguinaire et un pays en guerre, Adam a envoyé sa femme Nora et sa fille Maya à six mille kilomètres de là, dans un endroit où elles devraient l’attendre en sécurité. Il les rejoindra bientôt, et ils organiseront leur avenir. Mais arrivé là-bas, il ne les trouve pas. Ce qu’il découvre, en revanche, c’est un monde entre deux mondes pour damnés de la Terre entre deux vies. Un triller sur fond de jungle à Calais.

  • « Une Antigone à Kandahar » de Roy-Bhattacharya : une base américaine de la province de Kandahar en Afghanistan. Au loin, on distingue la silhouette d’une femme enveloppée dans sa burqa. Elle est descendue de la montagne en fauteuil roulant, puisque ses jambes ont été arrachées. Elle vient réclamer le corps de son frère, un chef tribal pachtoun abattu lors d’une offensive lancée contre les Américains.
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En quête de droit(s) – Outils et infos juridiques


  • « C’est l’Etat qui est hors-la-loi »  : réuni·es à Briançon le 7 mars, à l’occasion de la rencontre internationale des Européens solidaires, des membres d’associations d’aide aux personnes migrantes et réfugiées en Europe témoignent de la façon dont ils ont été attaqués, harcelés ou poursuivis par les autorités européennes. Leur constat : l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne utilisent des lois et des pratiques illégales. A lire ce reportage de Marguerite De Lasa sur Radio parleur.
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  • Et voici les premières publications des notes mensuelles de Human Rights Observers, un outil de recensement des violations des droits humain des personnes en situation d’exil à Grande Synthe et Calais, à trouver ici.

Pour comprendre / pour cogiter


  • Orspere Samdarra, Observatoire Santé mentale, Vulnérabilités et Sociétés a recensé et classé un grand nombre de ressources sur son site internet. Vous y trouverez notamment des rubriques rassemblant des ressources à destination du grand public, celles pour les personnes en situation de précarité et/ou de migration et d’autres à destination des professionnel.le.s et usager.es en santé mentale. A consulter ici

  • « Nous déposerons plainte contre la Grèce et l’UE pour les violations des droits des personnes migrantes et réfugiées fuyant la Turquie« . Retrouvez le communiqué de Migreurop du 5 mars et les noms des organisations signataires. A lire aussi l’article d’Amnesty International « Que se passe-t-il aux frontières de la Grèce et de la Turquie« 
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Des migrants qui souhaitent entrer en Grèce depuis le poste-frontière turc de Pazarkule © REUTERS/Alexandros Avramidis

  • Migrants face au coronavirus en France : « C’est compliqué de parler de confinement si on laisse des gens dehors« . La question de l’attitude à adopter face aux migrants dans le contexte du coronavirus se situe dans un problème plus général : celui de l’accueil de tous les sans-abri. La crise actuelle « ne fait qu’aggraver la situation sociale et sanitaire de ces publics fragiles dont font partie les migrants et les réfugiés », souligne un militant associatif dans le Val-de-Marne. Une enquête de France info Afrique du 31 mars.