La Lettre d'infos n°40

Publié le 7 mai 2020
Sommaire

Infos des lieux de vie


  • A Calais, 1100 personnes exilées restent « confinées dans la rue » et nombre d’entre elles ont faim. Depuis le début du confinement, la Vie Active, avec les consignes de distanciation sociale, ne distribue plus de repas chauds. Il y a également moins d’associations présentes sur le terrain même si les bénévoles ont essayé de se réorganiser au mieux : Salam poursuit ses distributions, tandis que le tout nouveau Calais Food Collective apporte des provisions afin que les personnes puissent cuisiner elles-mêmes. Mais pour cela il faut du bois et il en manque. Les expulsions forcées des lieux de vie continuent un jour sur deux, et ce malgré les diverses interpellations des associations, dont la dernière en date par Salam, dans ce courrier du 27 avril. Les départs volontaires pour une mise à l’abri dans un centre de la région se font, eux, désormais plus rares. Pendant cette période de confinement, les bénévoles ont également dû faire face à différentes entraves de la part des pouvoirs publics, comme expliqué dans cet article RFI en date du 10 avril.
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Expulsion rue des Huttes le 14 avril

  • Confinement et solidarité à Cherbourg : le Ramadan a commencé ce 23 avril. Itinérance Cherbourg fournit des denrées non périssables, conserves, riz, thé et sucre, tandis que la Chaudrée, association proposant chaque soir un repas à toute personne à la rue, fournit les produits frais. Le restaurant « Le Comptoir Libanais » de Cherbourg fournit deux fois par semaine le repas de rupture de jeûne pour les habitant.e.s du camp. L’accueil de jour, qui avait été ouvert pour les personnes exilées au début du confinement, est pour l’instant déserté, effet secondaire du Ramadan. L’association réfléchit aux modalités d’ouverture de ce lieu pour que les personnes puissent venir s’y détendre quelques heures par jour. Pour l’instant toutes les familles et personnes demandant l’asile qui le souhaitent sont hébergées, soit dans des appartements, soit dans des chambres d’hôtel soit au CAU Gambetta-Fontaine ou dans les CHRS (Centre d’hébergement et de réinsertion sociale).  Il reste quelques personnes seules ou en famille hébergés solidairement dans l’agglomération. Pour les familles, la communauté Emmaüs du Cotentin, toujours solidaire, distribue chaque mercredi des colis alimentaires sur rendez-vous dans les locaux d’Itinérance. A l’heure du déconfinement, lorsque qu’il faudra quitter les hébergements, beaucoup de personnes seront en grande difficulté. Restons vigilant.e.s…

  • A Grande Synthe, les « mises à l’abri » par l’Etat se sont trop souvent transformées en départs contraints pour les personnes exilées, escortées par des forces de police, en nombre impressionnant, vers les bus. Plusieurs associations alertent sur ces conditions de mise à l’abri dans un courrier au Préfet du Nord du 28 avril. Des opérations d’expulsion d’envergure, comme celle du 15 avril, ont ainsi poussé nombre de personnes, qui s’abritaient jusqu’alors sous les hangars de La Linière, à se disperser et se cacher encore davantage. Les petits camps qui ont tendance à se reconstituer en dehors de la Linière sont évacués, compliquant toujours plus l’accès aux services existants, alors même qu’un service sanitaire a enfin été mis en place, ainsi qu’un début de surveillance médicale actuellement indispensable. Les conditions sur la Linière restent déplorables même s’il y a  des douches (4 modules de 6 douches), 4 toilettes accessibles uniquement entre 7h et 17h, et un point d’eau potable (auparavant installé au Puytouck). Parallèlement, les solidarités sont là encore criminalisées : 4 bénévoles d’Utopia56 ont ainsi été placé.e.s en garde à vue pour des motifs plus qu’obscurs alors qu’ils et elles observaient l’expulsion violente d’un camp. Le communiqué de presse est à lire ici.

  • Du côté de Norrent Fontes : à Quernes les personnes attendent patiemment dans le petit bois… Le groupe de Saint Hilaire Cottes, qui survit habituellement aux abords des champs, est toujours dans des familles, où ça se passe très bien. Les personnes du Pradha à Fouquières les Béthune vont bien également : les travailleurs et travailleuses sociales leur donnent les attestations qui leur permettent de sortir quand elles le souhaitent et des masques en tissus lavables leur ont été distribués. Dans les CAES, la situation est plus difficile et inquiétante, notamment parce que les sorties sont très restrictives. Pour les familles, il n’y a plus aucune animation pour les enfants et très peu de possibilités de sortir.

  • A Ouistreham, grâce à la présence des bénévoles, les personnes exilées du rond-point de Ouistreham ont accepté de rejoindre dès le début du confinement le centre de vacances de Tailleville. Elles y sont accompagnées par des bénévoles de la Croix Rouge. Quelques jeunes ont donné de leurs nouvelles : « On fait beaucoup de match de foot et de basket. Nous sommes très contents. » Ils bénéficient aussi de cours de français. En lien avec les squats de Caen, les bénévoles du CAMO continuent de récolter des dons pour venir en aide à toutes ces personnes en grande difficulté. Pendant ce temps, depuis  le 16 mars, le maire de Ouistreham ferme tous les sanitaires publics de la ville. Les membres du CAMO sont très inquiets pour la suite et restent vigilants. A l’heure du déconfinement qu’adviendra-t-il des jeunes mis à l’abri ?

Infos des assos


  • Le Secours Catholique à Calais : confinement et fermeture de l’accueil de jour. Sans oublier l’aide matérielle d’urgence car la situation des personnes exilées se dégrade, l’équipe du Secours Catholique met en place des actions pour lutter contre l’isolement. Viens prendre un kahwa (virtuel) chez moi ! sont ainsi des rencontres virtuelles et informelles, chaque mardi, avec un.e invité.e, calaisien.ne ou d’ailleurs, de France ou de l’étranger. Déjà des coucous en direct du Maroc, de l’Italie…. Cela permet à chacun.e de proposer une  rencontre, quelle que soit la distance qui nous sépare. Des ateliers de langues en visioconférence sont aussi nés grâce au Kahwa, autour de la découverte des langues anglaise, persane arabe et française. Renseignez vous auprès de Mariam : mariam.guerey(at)secours-catholique.org.

  • 92 associations et collectifs se sont associées pour saisir conjointement 7 Rapporteurs des Nations Unies en charge des questions de pauvreté extrême, de santé, d’accès à un logement décent, à la nourriture, à l’eau potable et à l’assainissement, ainsi que des migrants et des défenseurs des droits humains. Il s’agissait de les alerter sur la situation des personnes vivant à la rue, dans des squats ou des bidonvilles, face au Covid 19. Lire le communiqué de presse du 9 avril ici.

Faire et dire, les personnes premières concernées


  • Lettre ouverte de la communauté Érythréenne de la « Jungle » de Calais dénonçant les violences policières sublies : « Nous sommes des exilés venant d’Érythrée. Nous sommes ici pour la simple raison de vouloir vivre notre vie en sécurité et avoir un futur. Nous ne sommes pas des criminels, nous sommes des migrants. Nous sommes des innocents qui essayons d’aller en Angleterre. Notre plainte concerne une compagnie de CRS et leurs actions impulsives et agressives à notre égard. Ils ne nous considèrent pas comme des êtres humains. Ils nous insultent de noms tels que monkey (singe), bitch (salope), etc… » La suite à lire ici.
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Denis Charlet / AFP | (illustration) Migrants à Calais, mars 2018.

  • A Marseille, des personnes migrantes montent une association pour dénoncer les violations de leurs droits. Allocations interrompues, absence de logement ou courriers égarés : un groupe de personnes a lancé une association afin de dénoncer de sérieux manquements à leurs droits, lesquels sont, disent-ils, d’autant plus bafoués avec le confinement décrété pour lutter contre le coronavirus. En un mois d’existence, l’association compte plus d’une centaine de membres. Lire l’article de Anne-Diandra Louarn pour InfoMigrants.
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Infos de la PSM


  • Triste nouvelle. La PSM a perdu un de ses soutiens, présent à ses côtés depuis plusieurs années : Alain Delame, militant d’Amnesty International sur Lille, très engagé sur la question des personnes exilées et membre du CA de la PSM, est décédé ce mercredi 6 mai. Nous pensons à sa famille et ses proches.

  • Le journal des jungles. Il est difficile de penser à  la prochaine résidence pour un nouveau numéro du journal en ces temps particuliers. Comment organiser ce moment où chacun.e se sentirait bien pour prendre la parole, écrire ?  Dans l’attente, on se souvient du numéro « Femmes traversant les frontières », avec l’interview de Hélia et Sotoda enregistrée lors de l’évènement « Mon mur n’est pas tombé », organisé à l’accueil de jour du Secours Catholique à Calais. A écouter ici. Découvrez également le puissant texte d’Helina dans le complément en ligne du Journal des Jungles n°13 !
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  • Soutenir la PSM ! Utilisatrices et utilisateurs du moteur de recherche Lilo, vous pouvez soutenir gratuitement la PSM en nous reversant vos gouttes ici ! Vous n’utilisez pas Lilo mais seriez partant.e.s ? C’est facile :
    1-Se rendre sur http://www.lilo.org/… pour utiliser le moteur de recherche Lilo (il faut « Choisir Lilo comme moteur de recherche » en l’ajoutant à votre navigateur).
    2-Cumuler au minimum 50 gouttes d’eau.
    3-Aller sur la fiche projet et verser au minimum 50 gouttes d’eau la première fois que vous nous versez vos gouttes. Les fois suivantes, c’est à souhait !

Envie d’agir


  • Projet art refuge, le coronaquilt : Lorsque des personnes à travers le monde sont invitées à s’isoler les unes des autres au sein des communautés, Art Refuge réfléchit à des moyens créatifs de nous réunir. En nous appuyant sur leur travail avec les réfugiés, ils nous invitent à nous asseoir autour d’une table communautaire virtuelle et à créer une nappe en patchwork. Vous pouvez coudre, dessiner, coller, coller, écrire, photographier. Découvrez  vite ce beau projet et surtout participez. Mode d’emploi et et galerie des réalisations déjà produites ici.
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Belles échappées


  • Des lectures, c’est encore le moment si vous ne les avez pas déjà faites !
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  • « Des objets de rencontre » de Lise Benincà : Lise Benincà a passé plusieurs mois au sein d’Emmaüs Défi, rue Riquet à Paris. Elle a eu l’envie de donner voix à ces objets patinés, dépareillés, parfois ébréchés mais toujours singuliers, qui sont passés de main en main avant d’arriver chez Emmaüs. Puis la présence des hommes et des femmes, salariés en réinsertion professionnelle chez Emmaüs, aux parcours chaotiques s’est imposée entre les lignes.

  • « Marx et la poupée » de Maryam Madjidi : Depuis le ventre de sa mère, Maryam vit  les premières heures de la révolution iranienne. Six ans plus tard, elle rejoint avec sa mère son père en exil à Paris. À travers les souvenirs de ses premières années, Maryam raconte l’abandon du pays, l’éloignement de sa famille, la perte de ses jouets, l’effacement progressif du persan au profit du français…

En quête de droit(s) – Outils et infos juridiques


  • Protocole sur les violences policières :  pendant cette crise sanitaire nous avons assisté à une recrudescence des violences policières envers les personnes exilées. Des associations se sont mobilisées pour créer un protocole afin d’aider les personnes qui vont sur le terrain à répondre rapidement et efficacement à cette situation. Si vous avez des questions, souhaitez des compléments d’informations, ou avez des remarques éventuelles, vous pouvez envoyer un mail à policeviolenceatborder(at)framalistes.org. A voir également le dernier rapport de l’ACAT (Association Chrétienne pour l’Abolition de la Torture) sorti le 11 mars dernier, « Maintien de l’ordre : à quel prix ? », qui révèle les dysfonctionnements du maintien de l’ordre depuis 2000.
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  • La Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović, a rendu public  son rapport annuel d’activité 2019. La Commissaire se déclare préoccupée par la façon dont les pays européens traitent les personnes migrantes et demandant l’asile.  » La normalisation croissante des refoulements illégaux et les actes visant à déshumaniser les personnes qui tentent de traverser les frontières sont particulièrement inquiétants. Certains États membres ont laissé s’installer et s’aggraver des crises humanitaires graves liées aux conditions d’accueil ». Lireici le chapitre consacré aux  droits de l’homme des immigrés, des réfugiés et des demandeurs d’asile et accéder au rapport annuel d’activité 2019 de la Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe.

Pour comprendre / pour cogiter


  • « Certains migrants retrouvent dans le confinement quelque chose de familier ». Avec la pandémie, les réfugié.e.s sont devenus plus invisibles encore. Pourtant, atteintes par le virus ou non, les personnes ont plus que jamais besoin qu’on écoute leur corps malmené, explique Marie-Caroline Saglio-yatzimirsky, psychologue à l’hôpital Avicenne de Bobigny. A lire l’article de Virginie Bloch-Lainé paru dans Libération du 23 avril.
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Un réfugié du campement installé le long du canal Saint-Denis, à Aubervilliers, le 20 mars. Photo Hervé Lequeux. Hans Lucas

  • Les vies encampées et ce que nous en savons. «  Depuis presque un mois et demi, comme la moitié de la population de la planète, nous sommes confiné.e.s. Tout le monde s’interroge sur le bouleversement de son quotidien, sur cette restriction de liberté, et sur la durée de cette période… Nous faisons ainsi un tout petit peu l’expérience de celles et ceux qui passent leur vie en camp – de réfugié.e.s, de déplacé.e.s internes, de migrant.e.s, de rétention. » Par Michel Agier dans Libération du 21 avril.
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Dans l’un des camps de l’île de Lesbos, le 2 avril 2020. Photo Manolis Lagoutaris. AFP

  • Le GISTI publie 6 vidéos à partager pour dénoncer la situation des violences contre les exilé·es à la frontière gréco-turque. Des personnes exilées témoignent : les images qu’elles ont enregistrées montrent la violence de l’armée et de la police grecque et le dénuement dans lequel elles sont contraintes à vivre, abandonnées de tous. Elles les montre aussi en résistance, manifestant pacifiquement derrière les barbelés grecs, aux cris de « We want freedom ! ». A découvrir ici
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  • Les migrants dans l’épidémie : un temps d’épreuves cumulées : L’hébergement groupé dans les centres de rétention et les campements de rue multiplie les risques sanitaires pour les personnes migrantes. Michel Agier en dresse un état des lieux et lance un appel au « désencampement ». Quand on n’a pas de véritable « chez soi », le confinement accroît l’angoisse et l’inconfort, comme le rapporte Annabel Desgrées du Loû à propos des femmes immigrées vivant en hôtel sociaux et en centres d’hébergement. En temps d’épidémie, l’étranger est trop facilement assimilé à la menace sanitaire.  A lire dans le numéro 18 de la revue De facto publié par l’Institut Convergences Migrations.
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