La Lettre d'infos n°55

Publié le 5 août 2021
Sommaire

Infos des lieux de vie


L’été à la frontière franco-britannique

  • A Calais, « Cet été, comme depuis deux décennies,  il y a urgence ! ». L’urgence, selon le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, est de sécuriser davantage la frontière franco-britannique, renforcer la présence policière, lutter contre les passeurs. Urgence également, pour les associations humanitaires qui s’alarment : comment poursuivre leurs missions ? Comment distribuer de la nourriture alors qu’un arrêté préfectoral interdit cette activité dans une partie de la commune et que les autorités intensifient la pression sur la dizaine de campements situés en périphérie de la ville ? « En ce moment, les évacuations ont lieu tous les jours, à des rythmes différents. La police ne vient plus nécessairement le matin, mais parfois en plein après-midi », rapporte Pierre Roques, de l’association Utopia 56. La suite dans le reportage de Juliette Bénézit pour Le Monde.
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Des personnes exilées, privées de leur tente par les forces de police, dorment à même le sol, à Calais (Pas-de-Calais), le 16 juillet 2021. SAMUEL GRATACAP POUR « LE MONDE »

  • Les traversées de la Manche en « small boats » en nette augmentation. Cet été, les tentatives de traversées se multiplient malgré le danger. Lundi 19 juillet, au moins 430 personnes ont rejoint le Royaume-Uni par la mer. Un record. C’est en 2018 que les premières embarcations ont commencé à débarquer en nombre jusqu’aux côtes du Kent. Cette année-là, d’après la préfecture du Pas-de-Calais, 276 personnes ont rejoint l’Angleterre. Puis les chiffres ont explosé : 1 905 arrivées ont été enregistrées en 2019, 8 483 en 2020. De part et d’autre de la Manche, cette situation a entraîné des réactions en urgence. A retrouver dans Le Monde.

  • Sur le secteur de Saint Hilaire Cottes, le nombre d’exilés présents se maintient à 12. Ce sont des érythréens très discrets et respectueux de l’endroit où ils survivent. Ils sont hébergés chez des bénévoles de Terre d’errance tous les week-ends. (N’hésitez pas à contacter Terre d’Errance si vous souhaitez devenir hébergeuse ou hébergeur. Les bénévoles qui hébergent sont trop peu nombreu.x.ses.) De façon aléatoire, et liées à un arrêté anti-bivouac, des interventions de la gendarmerie ont lieu pour les chasser de ce secteur. A Quernes, 3 soudanais sont là maintenant depuis plusieurs années (4-5 ans). Le moral est assez affecté même s’ils sont toujours très souriants.

  • A Ouistreham, une alerte expulsion vers le Soudan pour une personne qui habitait sur le campement, plus d’informations et une invitation à signer la pétition adressée au préfet du Calvados ici. S’agissant des procédures juridiques aux fins d’expulsion du campement, les personnes ont obtenu un court répit : la demande d’expulsion par le propriétaire du terrain sur lequel (sur)vivent les personnes soudanaises, a été rejetée par le tribunal administratif de Caen fin juin. Le juge des référés a rejeté en indiquant que le tribunal administratif n’était pas compétent, estimant que la parcelle, sur laquelle est installé le campement, ne relève pas du domaine public. Un pourvoi a été formé devant le Conseil d’État par le propriétaire.
et ailleurs

  • A Paris, sur la très chic place des Vosges, entre 400 et 600 personnes sans abri se sont regroupées ce 29 juillet. Les associations réclament des solutions d’hébergement pour tous. «On envoie régulièrement des alertes aux pouvoirs publics mais on n’a jamais aucune réponse. La seule façon de se faire entendre, c’est d’occuper des lieux», résume Kerill Theurillat, coordinateur de l’antenne parisienne de l’association Utopia 56. Il demande l’application de mesures de réquisitions de logements vacants, une mesure peu coûteuse qui pourrait mettre à l’abri des milliers de personnes dans la capitale. A lire dans Libération.
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Alain Jocard/AFP

  • Le 22 juillet, plus de 200 personnes ont réussi à pénétrer dans l’enclave espagnole de Mélilla. C’est  un des plus importants passages depuis ces dernières années. Ces arrivées interviennent un peu plus de deux mois après l’important afflux dans l’autre enclave espagnole en terre marocaine, Ceuta. A retrouver sur Infomigrants.

  • Sur l’île grecque de Kos, la détention des demandeurs d’asile est quasi systématique. Depuis la fin 2019, presque tous les nouveaux arrivants sont mis en détention dans le seul centre de rétention de la mer Egée. Les ONG craignent que cette pratique ne soit étendue aux autres îles, où de nouveaux camps fermés sont en construction. Les policiers détruisent toutes les caméras des téléphones portables des migrants. « Personne ne raconte ce qu’il se passe à l’intérieur. La nourriture distribuée est périmée. Un homme est mort lors de notre séjour. Mes enfants étaient terrifiés et me demandaient si, nous aussi, nous allions mourir ici… », relate Sarah. Des témoignages à retrouver ici.
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KOS, GREECE, MAY 7, 2021: Credit: Byron Smith for Le Monde

Infos de la PSM


  • A noter dans vos agendas ! Le samedi 25 septembre 2021, c’est le Forum de la PSM ! On espère fort pouvoir vous retrouver en vrai pour cette édition 2021… Une édition à ne pas rater puisque vous y seront notamment dévoilés les 2 rapports issus du travail d’enquête et d’analyse de Marta et Pierre !!! De quoi nourrir notre projet de plaidoyer et de construction de nouvelles alliances à la frontière dans les mois qui suivent… Et réservez dès maintenant votre soirée du 25 : on discutera projet d’accueil autour d’une projection aux petits oignons !

Infos des assos


  • Connaissez-vous l’association Watizat ? Elle milite pour l’accès à l’information  des personnes exilées et édite un guide multilingue (français, anglais, arabe, pachto et dari) mis à jour et imprimé tous les mois depuis mars 2018. Il a pour but d’informer les personnes exilées en leur donnant accès à une information claire sur la procédure d’asile et les adresses et conseils utiles au quotidien dans plusieurs villes françaises. Le guide parisien est téléchargeable ici
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  • Itinérance Cherbourg : un projet de café solidaire à suivre. Durant la crise sanitaire, les migrants en transit ont eu un accès plus restreint à des lieux d’accueil sans possibilité de se poser pour prendre un petit déjeuner ou simplement un thé. Itinérance a alors eu l’autorisation de la Municipalité d’ouvrir et d’aménager une  grande salle, devenue salle d’accueil de jour. Du lundi au vendredi, chaque après-midi, des bénévoles sont présents pour les accueillir. C’est un moment de repos, de détente à l’abri. C’est un moment de convivialité, de rencontres et d’échanges. Aussi le projet est-il de maintenir cet accueil, et d’y adjoindre avec des plages d’ouverture définies un «café solidaire », coanimé par des binômes bénévoles / migrants pour leur permettre d’exercer leur talent et mettre en valeur leurs savoir-faire en artisanat, art, musique… Des projets similaires se réfléchissent aussi à Dieppe et Caen.

  • Le 17 juillet, le Calais Food Collective a mené une action contre la non-prise en charge des déchets sur les bidonvilles de Calais.  Les associations  demandent à nouveau l’application de l’article L.2212-2, soit une prise en charge réelle et effective des déchets avec un système de ramassage régulier et couvrant l’ensemble des bidonvilles, les équipements nécessaires à des conditions sanitaires dignes (bennes, bacs de collecte, sacs de poubelle distribués avec les repas). Retrouvez leur Communiqué de presse
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  • Des scouts en renfort à l’accueil de jour du Secours Catholique de Calais : ils ont entre autres animé un atelier de rénovation du mobilier. Les bancs ont été réparés et repeints avec des exilés soudanais et érythréens. De beaux moments de partage pour changer le regard des jeunes mais aussi, par ricochets, celui de leur entourage.
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Faire et dire, les personnes premières concernées


  • Tokyo : l’équipe des réfugiés, de la lutte au rêve olympique. Pas moins de 29 athlètes réfugiés, originaires de 11 pays, concourent sous le drapeau olympique lors des Jeux de Tokyo, à l’instar de la cycliste afghane Masomah Ali Zada, «petite reine de Kaboul». Pour Masomah Ali Zada, née en Afghanistan et  dont le parcours a été semé d’embûches, participer à l’expérience olympique est le rêve d’une vie. A lire dans Libération.
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La cycliste afghane Masomah Ali Zada . (Fabrice Coffrini / AFP)

  • Des mineurs étrangers « maltraités », des employés sous « pression » dénoncent  : une association est accusée de graves dysfonctionnements. Climat de « terreur », insultes racistes, humiliations et maltraitance… Une responsable de l’association Le Lien, chargée de la gestion de lieux d’accueil réservés aux mineurs étrangers dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine, est accusée de faire subir des pressions psychologiques à ses employés et des violences verbales ou physiques aux jeunes pris en charge. Ils sont une dizaine à dénoncer les faits auprès de Mediapart. Retrouvez leurs témoignages ici.

Envie d’agir


  • Pétition à signer et relayer dans vos réseaux ! Il s’agit d’une pétition adressée au préfet du Calvados pour empêcher une expulsion vers le Soudan d’une personne retenue au CRA de Oissel qui (sur)vivait auparavant sur le campement de Ouistreham. La pétition est à trouver sur ce lien sur le site de la Cimade.

Belles échappées


  • Amal, cette  petite fille de 9 ans, représentée par une marionnette de 3,50 mètres de haut va parcourir 8 000 kms à pied. Nous avions déjà parlé de ce beau projet (lettre d’info 53). Cette fois elle est partie, le mardi 27 juillet, de la frontière syro-turque. Elle arrivera à Dunkerque et Calais au mois d’octobre. Stephen Daldry et Amir Nizar Zuabi, producteur et directeur artistique de ce projet hors normes, racontent comment elle est née pour le journal Le Monde.
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La marionnette Amal, en 2020, avec des enfants en Afrique du Sud. BEVAN ROOS

Parlons-en : échanges, débats, conférences, formations


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Image de l’affiche de la conférence : dessin Elisa Perrigueur

Désinfox, outils pour lutter contre les idées reçues


  • Déconstruire le mythe de « l’appel d’air ». Cette  expression est récurrente depuis les années 2000. De manière générale, elle est souvent associée à celles de « submersion » ou de « vague » migratoire, de « grand remplacement » et « d’invasion ». Autant d’expressions qui, selon le chercheur François Gemenne, « déshumanisent les migrants » et n’abordent les migrations que comme « un problème à résoudre ». C’est la désinfox du mois de juillet de l’Institut Convergences Migrations.

En quête de droit(s) – Outils et infos juridiques


  • La Cimade publie une Foire aux questions (FAQ) sur la procédure française en cas de décès d’une personne exilée. Cette FAQ est destinée aux personnes et organisations accompagnant des familles ou des proches de personnes exilées décédées sur le territoire français. A retrouver et télécharger sur  le site de La Cimade.
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Graffiti en hommage à M. Mulule Debesay Gerense, décédé le 21 mai 2019, Calais. Crédit photo: La Cimade

  • 6 ONG saisissent le Conseil d’État pour mettre fin aux contrôles d’identité au faciès. Cette action de groupe constitue une procédure innovante en ce qu’elle permet à des associations de la société civile de demander à la justice de contraindre les autorités responsables à prendre les mesures utiles à la disparition des graves illégalités que constitue cette pratique généralisée. Elle fait suite à une mise en demeure adressée le 27 janvier 2021 au Premier ministre, au ministre de l’Intérieur et au ministre de la Justice pour leur demander d’engager des réformes structurelles et des mesures concrètes afin de mettre un terme aux pratiques policières discriminatoires, qui ont été reconnues par le président de la République. Plus de détails avec l’une de ces ONG, Amnesty International.
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illustration Vincent Devillard Maruemesdroits

  • Sarah Mardini risque toujours 15 ans de prison pur avoir essayé de sauver des vies. En 2015, avec sa sœur Yusra, elles avaient sauvé 18 réfugiés syriens grâce à leur talent en natation. Aujourd’hui, Yusra participe aux JO pour la 2ème fois. Sarah dédie sa vie au sauvetage en mer. Elle  risque 15 ans de prison pour ses activités. Elle raconte sur Brut.

Pour comprendre / pour cogiter


  • Le relai médiatique pour faire bouger les lignes : un révélateur de l’époque : puisque les polémiques fonctionnent à l’émotion, c’est désormais sur ce terrain que l’on fait bouger les pouvoirs publics. Pour le gouvernement, la question migratoire est un enjeu électoral fort qu’il faut – en général – traiter avec fermeté. Mais lorsqu’il s’agit d’un récit de vie cabossé que l’on raconte à tous les JT, impossible de rester sourd, au risque de paraître dénué d’empathie. Les combats de ces petits patrons racontés dans les colonnes des quotidiens locaux ont alors le mérite de replacer les vies humaines au centre du débat. A lire l’article paru dans Libération.

  • L’immigration s’installe au cœur des fractures qui marquent la société française. « Ceux qui s’opposent à son sujet semblent n’avoir même plus de terrain commun qui leur permettrait de se parler. Pourquoi cette radicalisation alors que l’immigration est fort ancienne ? C’est que l’évolution de la société a remis en cause le compromis tacite qui a longtemps régi la rencontre entre une vision politique de la nation et la vie du corps social. » Une tribune du sociologue Philippe d’Iribarne dans Le Monde.

  • Ce qui attend les personnes migrantes à leur arrivée au Royaume-Uni. En à peine six mois, la Border Force britannique a intercepté le long de ses côtes plus de 5 000 personnes. Toutes ont tenté de traverser la Manche depuis la France sur de petits bateaux, malgré le froid, le vent et les courants. Si poser le pied au Royaume-Uni est pour de nombreux exilés une première victoire, c’est aussi, pour la plupart d’entre eux, le début d’un long chemin administratif. A lire sur Infomigrants.