La Lettre d'infos n°18

Infos des jungles

• A Grande-Synthe, les « mises à l’abri humanitaire » selon la préfecture, les expulsions d’habitant.e.s de terrain selon les associations, se multiplient. Près de 400 personnes survivent actuellement sur le camp dit de la gare, le site appartenant à la Communauté Urbaine de Dunkerque. Vous pouvez lire ici un article de presse relatant différents « coups de pression » autour de ce nouveaux camps. Y est d’ailleurs évoquée l’interdiction faite aux associations et aux bénévoles anglais.es de rentrer sur le camp depuis le 29 juin. Le préfet et le sous préfet ont été interpellés par les associations sur cette discrimination manifestement illégale. Un communiqué de presse inter-associatif a été publié le 13 juillet, il inclut un enregistrement du Refugee Women’s Center daté du 29 juin au cours duquel des policiers refusent l’entrée à des bénévoles étrangers.

• Angres – Les exilé.e.s vietnamien.ne.s qui avaient été expulsé.e.s du camp municipal d’Angres le 3 mai dernier ont essayé de trouver un nouveau lieu de vie. Après avoir été chassé.e.s de diverses propriétés privées, parcs et autres, ces personnes se sont établies dans un bois sur la commune de Souchez. Mais un arrêté du maire de Souchez du 25 juin a interdit l’occupation de ce bois. Il commandait de quitter les lieux dans les 24 heures. Finalement, les exilé.e.s présent.e.s ont été expulsé.e.s ce 5 juillet. Les mineur.e.s ont été mis.e.s à l’abri et des adultes emmenés à l’Hôtel de Police de Coquelles.

• A Calais, les personnes exilées continuent à se faire expulser et exclure de la ville, d’une manière ou d’une autre. Les personnes survivant dans le bois Chico Mendes, dans le quartier de Beau-Marais, ont ainsi appris que le bois allait être entouré très prochainement d’une clôture, avec le projet de transformer celui-ci en parc. Plusieurs bénévoles d’associations, à titre collectif ou en tant que simples habitant.e.s concerné.e.s, ont décidé de se rendre à une consultation publique sur le sujet, le 12 juin dernier, pour entendre les inquiétudes des riverain.e.s d’un côté, faire entendre leurs inquiétudes et celles des personnes exilées face à l’érection de nouvelles grilles dans la ville de l’autre, et rappeler finalement que des personnes vivant sur le site allaient une nouvelle fois être expulsées sans solution appropriée. Ici, un article relatant les échanges de cette soirée.

Infos des assos

• La Marche citoyenne et solidaire, partie le 30 avril de Vintimille pour réaffirmer la nécessité d’accueillir les personnes migrantes, pour dénoncer le blocage des frontières et le « délit de solidarité », est arrivée dans le Nord-Pas-de-Calais le 28 juin dernier.

• Des coordinations locales ont organisé un accueil des marcheuses et marcheurs aux différentes étapes, solidaire, festif, rempli d’échanges et de partages : Cambrai, Douai, Lille, Steenwerck, Hazebrouck, Grande-Synthe, Gravelines et enfin Calais, le 7 juillet. Sur cette dernière étape, hautement symbolique, ce sont des centaines de personnes qui ont traversé la ville, depuis l’ancien site du bidonville jusqu’au centre-ville, en passant par le port. Différentes prises de parole ont ponctué cette étape, dont celle des États Généraux des Migrations du Nord-Pas-de-Calais, se référant au Manifeste porté par une centaine d’assemblées locales dans toute la France et posant les bases d’une politique migratoire radicalement différente.

Mais, le dimanche 8 juillet, alors que les marcheuses et marcheurs s’apprêtaient à rejoindre leur ultime étape – Londres -, 22 d’entre elles et eux, membres de la Coordination des Sans Papiers de Paris (CSP75), ont été empêché.e.s de passer et enfermé.e.s au centre de rétention (CRA). Ces personnes participaient à la Marche depuis 2 semaines et avaient informé les autorités de leur intention de participer à cette dernière étape. Les mobilisations ont été immédiates et se poursuivent. 17 personnes sont sorties du CRA au compte-goutte, dont 7 avec des OQTF (obligation de quitter le territoire). Sur les 5 personnes restées enfermées, 3 marcheur.se.s ont été libéré.e.s  par le TGI de Lille et celui de Rouen les 10 et 11 juillet : les juges ont considéré que l’arrestation lors d’un cortège déclaré portait atteinte à la liberté de manifestation. Mais 2 autres marcheurs ont vu leur rétention prolongée à Coquelles, Ici, vous trouverez des appels à mobilisation jusqu’à libération de l’ensemble des marcheurs enfermés.

• La Cimade a 2 pétitions qui circulent actuellement : une pour demander la fin de l’enfermement d’enfants dans les centres de rétention. Emma, dessinatrice, a d’ailleurs réalisé une petite bande-dessinée pour expliquer ce qu’est un centre de rétention administrative et y invite à signer la pétition de La Cimade. C’est ici !  Une seconde pétition réclame, quant à elle, de « sortir de l’enfer du système Dublin ». A signer et faire circuler massivement, ici.

• Une délégation de bénévoles du CCFD était à Calais ce 23 juin, pour rencontrer des bénévoles et militant.e.s sur place (notamment l’Auberge des migrants et le Secours Catholique de Calais) et se faire une idée de la situation à la frontière franco-britannique. Cette visite s’inscrivait dans la préparation du 8ème Forum Mondial des Migrations, qui se tiendra à Mexico et où le CCFD va animer un atelier sur le thème des frontières et du non-respect de la liberté de circulation.

Infos de la PSM

• Le 11 juin, la PSM inaugurait son cycle de « conseils d’administration itinérants » en se rendant à Rouen ! Accueilli.e.s dans un squat installé au cœur de la ville, dans une ancienne maison de retraite où vivent désormais des personnes étrangères, les membres du CA ont pu à la fois en apprendre plus sur ce lieu d’accueil et de construction d’une vie en collectivité, et rencontrer de nombreuses associations mobilisées sur Rouen, ainsi que le Collectif d’aide aux migrants à Ouistreham (Le CAMO) et La Cimade de Caen.

• Deux formations sur les droits des bénévoles ont eu lieu à Calais et Grande-Synthe ce mois de juin en partenariat avec La Cabane Juridique. Nous avons partagé nos expériences, écouté les témoignages de bénévoles poursuivi.e.s et essayer de penser nos relations aux forces de l’ordre. A l’occasion de ces formations, nous avons étoffé les documents présents sur le site internet de la PSM dans les rubriques « délit de solidarité » et « défense des militant.e.s et bénévoles ». Nous vous invitons particulièrement à consulter une fiche pratique, qu’il peut être intéressant de lire avant d’agir sur le terrain.

• Un « atelier sensibilisation » s’est également tenu le 15 juin, rassemblant une dizaine de personnes autour d’une réflexion sur les jeux de rôles. Après en avoir pratiqué un le matin, nous amenant à construire des personnages et des scénarios de rencontre, nous nous sommes collectivement entraînés à lutter contre le préjugé : « Aider les migrant.e.s, c’est prendre à nos pauvres », à partir de l’outil du débat mouvant. Prochain atelier sensibilisation à la rentrée !

• Le 22 juin, la PSM vous invitait à une conférence à Calais autour de 3 auteur.e.s de « l’Atlas des migrants en Europe » : Elsa Tyszler y a présenté la situation à la frontière maroco-espagnole, évoquant la dimension à la fois racisée et genrée des violences de cette frontière. Sara Casella-Colombeau s’est, elle, penchée sur les formes de contrôle à la frontière franco-italienne, entre Vintimille et Menton, soulignant de fait davantage leur continuité dans le temps que les éventuelles ruptures. Quant à Maël Galisson, il est revenu sur la question des morts à la frontière franco-britannique, pointant les différents enjeux sous-jacents à ce recensement. La discussion avec la salle s’est terminée par un appel à prendre au sérieux la revendication de « la liberté de circulation », et à oser porter celle-ci publiquement, comme revendication crédible et pragmatique.

• Les 22, 23 et 24 juin, une résidence du Journal des Jungles s’est tenue à Grande-Synthe, chaleureusement accueillie au sein de la Communauté Emmaüs de Dunkerque ! Aux côtés de l’équipe éditoriale du Journal : Séverine Sajous du collectif Jungleye, Louise Druelle (Loup Blaster), Cécilia Torf et Émilie Dalage, venues prêter toute leur expérience et créativité  à cette résidence, ainsi que les incroyables bénévoles du Refugee Women Center. Cinq familles exilées ont participé à ces 3 journées de création et d’écriture, partageant expériences, histoires, poèmes, chants et danse, et cuisine aussi… On a bien hâte de vous présenter ce n°11 !

Autres événements et mobilisations

• Dans une décision du 6 juillet, le Conseil constitutionnel, saisi par une douzaine d’associations et des militant.e.s, a consacré la valeur constitutionnelle du « principe de fraternité » et considéré qu’il en découlait « la liberté d’aider autrui, dans un but humanitaire, sans considération de la régularité de son séjour sur le territoire national ». Le Conseil constitutionnel abroge ainsi, de manière partielle, le délit de solidarité. Pour lire le communiqué de presse du Collectif Délinquants Solidaires sur le sujet, c’est ici !

Outils juridiques

• Vous trouverez, sur le site de la Cimade, les statistiques concernant l’application du règlement dublin III en France en 2017. Le constat de la Cimade est que les saisines des états membres responsables de la demande d’asile explosent, mais que les transferts effectifs restent proportionnellement peu élevés (9%).

• Des outils relatifs aux personnes dublinées sont disponibles sur le site de la PSM, ici.

Sensibilisation : outil(s) du mois !

• Les associations et collectifs membres de la PSM sont très actives dans le domaine de la sensibilisation. Dominique, qui intervient auprès des personnes exilées de Longuenesse, nous partage ici son expérience avec des élèves de primaire. Parti.e.s du thème du voyage, le groupe en est ainsi venu à discuter de ce qu’est, pour elles et eux, une personne exilée…

• On vous en a parlé plus haut : Emma, dessinatrice, a produit une petite bande-dessinée pédagogique et militante sur les centres de rétention administrative, en y soulevant notamment la question de l’enfermement des enfants (mais pas que). A retrouver ici.

• Vous n’avez pas pu assister à la conférence organisée le 22 juin dernier autour de l’Atlas des migrants en Europe ? Migreurop met à disposition différentes cartes présentes dans l’ouvrage. Découvrez notamment celle sur la cristallisation des violences et des violations des droits à la frontière franco-italienne ici (Le document est disponible en format PDF au bas de la page).

Pour comprendre / pour cogiter

• Le Centre Primo Levi (soins aux victimes de la torture et de la violence politique) et Médecins du Monde viennent de sortir un rapport sur la souffrance psychique des personnes exilées et sa non-prise en charge. On y trouve notamment des propositions de plaidoyer sur cette thématique trop souvent délaissée…

• Autre rapport : celui produit par La Cimade sur les conditions d’exercice du droit d’asile en rétention. Issu d’un travail de terrain et de recherche au sein du centre de rétention administrative du Mesnil-Amelot (Seine et Marne), le rapport « Le droit d’asile en rétention : l’analyse d’une chimère » peut être téléchargé ici.

• Le 23 juin, Michel Agier et Maël Galisson sont venus présenter à la librairie du Channel l’ouvrage collectif « La Jungle de Calais », sorti en mars 2018. Martine Devries y était et vous propose ici une note de lecture, doublée d’un petit compte-rendu de la présentation. Bonne lecture !

• Le 28 juin, les États européens ont parlé migrations à Bruxelles et ont pris des décisions lourdes de conséquences. Pour s’y retrouver, voici une petite vidéo présentant les 3 principales décisions prises par le Conseil européen. Elle a été réalisée par le CIRE, coordination associative belge.