La Lettre d'infos n°46
Publié le 5 novembre 2020
Sommaire
Infos des lieux de vie
- Encore un naufrage dans la Manche. Le naufrage du 27 octobre a tué 7 personnes, dont cinq d’une même famille. Le plus jeune des enfants avait 15 mois. C’est d’ores et déjà le pire drame migratoire survenu dans la Manche. Le lendemain, près de 80 personnes se sont rassemblées à Calais, au Parc Richelieu, pour dénoncer une nouvelle fois ces morts à la frontière et les politiques qui les causent. A lire notamment, le communiqué du collectif dunkerquois Ripostons, présent au rassemblement.
- A Calais, confinement ou pas, l’arrêté empêchant les distributions alimentaires est prolongé et les expulsions des lieux de vie se poursuivent. Le 19 octobre, un 3ème arrêté préfectoral est venu prolonger l’interdiction de distribution alimentaire pour les associations non opératrices sur un périmètre encore élargi. Le 22 octobre 2020, la préfecture du Pas-de-Calais procédait à l’expulsion et à la destruction massive d’un campement où (sur)vivaient près de 300 personnes exilées. Encore une fois, les associations dénoncent la brutalité et l’inefficacité de ces opérations, qui ne respectent pas les droits fondamentaux des personnes exilées. 8 d’entre elles attaquent d’ailleurs la préfecture en justice, à propos de l’expulsion qui a eu lieu le 29 septembre dernier sur une base légale plus que douteuse : la flagrance. Pour mieux comprendre, c’est ici ! Pendant le confinement, de nouveaux départs volontaires vers des centres d’hébergement dans le département, mais de nouveau éloignés de Calais, devraient être proposés aux personnes.
- A Grande-Synthe, les associations ont décidé de poursuivre leur action autant que possible pendant cette période de confinement. La situation ne s’améliore pas pour les 400 à 500 personnes qui survivent aujourd’hui dans des campements : après de multiples demandes des associations, 6 toilettes sèches ont été installées par la mairie, mais ce dispositif est à la fois insuffisant et inadapté pour les personnes sur place; les distributions alimentaires se font dans la boue, et aucun dispositif d’hébergement n’a été annoncé à ce jour, que ce soit par la mairie ou par l’État, pour permettre aux personnes de se confiner et de se protéger face au virus.
- Un campement d’exilé.e.s au sud de la Belgique qui fait écho à ce qui se passe dans le nord de la France et ailleurs en Europe. « La parcelle n’est pas bien grande. Quelques centaines de mètres carrés de verdure parsemés de grands arbres feuillus. Derrière ces denses branchages, à l’abri des regards, vit un véritable petit village. Le long d’étroits sentiers qui traversent un épais sous-bois, on a planté des tentes de camping, ficelé de grandes bâches sur des troncs d’arbres, bâti de frêles maisonnettes à l’aide de plaques de frigolite, de planches en bois et de tout ce que l’on a pu récupérer ici et là. Ce village, on l’a surnommé « la forêt ». Ou plutôt « la forest », car l’on use ici de la langue parlée sur l’île qui rythme les rêves et le quotidien du lieu : la Grande-Bretagne ». A lire dans la revue BALLAST.
Infos des assos
- La Cabane Juridique a actualisé son flyer pour informer les personnes exilées sur les permanences qu’elle tient au Secours Catholique de Calais, tous les lundis après midi. Elle y accompagne les personnes sur les demandes d’asile.
- Par ailleurs, la répression qui s’opère à Calais étant toujours aussi forte, la Cabane Juridique a besoin de vous pour maintenir son action de lutte pour un accès au droit pour tou.te.s. Voici un lien vers leur cagnotte.
Faire et dire, les personnes premières concernées
- Asif a 16 ans. Parti d’Afghanistan, il est arrivé à Calais il y a deux mois dans l’espoir de traverser la Manche. Il raconte dans cette vidéo réalisée par Brut.
- « Je voulais une chance de vivre » : des récits de jeunes filles et garçons, mineur.e.s isolé.e.s étranger.e.s, recueillis par Noémie Paté et Jean François Roger. « Ces récits nous emportent et nous dévoilent la douleur de l’exil, la souffrance de la séparation d’avec les être aimés, de la perte des racines, de l’impossible retour. Mais c’est aussi à nos propres échecs qu’ils nous renvoient, à celui de notre humanité, de notre hospitalité, aux carences de notre système de protection et d’accueil qui ont tenté de céder le pas à un système de contrôle, de fichage et de suspicion. » Préface de Jacques Toubon.
Infos de la PSM
- Une résidence du Journal des Jungles s’est tenue à Caen du 16 au 18 octobre ! Chaleureusement accueilli.e.s dans les locaux du syndicat Solidaires, avec un gros travail de préparation réalisé en amont par les ami.e.s du CAMO (Collectif d’aide aux migrants de Ouistreham), nous avons pu échanger avec de jeunes hommes soudanais survivant dans des campements de fortune sur un quai de Ouistreham, et des demandeurs d’asile, qui se retrouvent « entre parenthèses » à Caen. Leur choix de thème : les violences, dans leurs multiples facettes, notamment policières. Et le besoin de les déposer dans ce journal, malgré la souffrance… Sortie prévue en janvier 2021.
- A vos agendas ! Les temps du Covid sont bien incertains, et c’est à une conférence-atelier en visio que la PSM risque de vous inviter ce vendredi 4 décembre, fin d’après-midi : le GISTI partagera son analyse sur les processus d’externalisation de la frontière, et plus particulièrement l’externalisation de la demande d’asile. L’intervention sera suivie d’un atelier pour prolonger la réflexion ensemble sur les solutions imaginées ou à imaginer pour que les personnes ne se retrouvent plus bloquées à la frontière franco-britannique, en prêtant attention à chaque fois aux enjeux sous-jacents.
- Soutenir la PSM ! Utilisatrices et utilisateurs du moteur de recherche Lilo, vous pouvez soutenir gratuitement la PSM en nous reversant vos gouttes ici ! Vous n’utilisez pas Lilo mais seriez partant.e.s ? C’est facile :
1-Se rendre sur http://www.lilo.org/… pour utiliser le moteur de recherche Lilo (il faut « Choisir Lilo comme moteur de recherche » en l’ajoutant à votre navigateur).
2-Cumuler au minimum 50 gouttes d’eau.
3-Aller sur la fiche projet et verser au minimum 50 gouttes d’eau la première fois que vous nous versez vos gouttes. Les fois suivantes, c’est à souhait !
Envie d’agir
- Le PEROU et le projet de conduire une instruction auprès de l’UNESCO visant à faire reconnaître l’acte d’hospitalité au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité. De la « jungle » de Calais, le PEROU a rapporté les preuves d’une humanité capable de toutes les résistances malgré la violence incessante, étatique autant que civile. Cet inventaire des actes d’hospitalité ayant lieu à Calais a été poursuivi parallèlement en Italie en 2020. « Car ces actes font tenir notre humanité, ils sont tout ce à quoi nous tenons aujourd’hui. Ils sont vitaux pour les générations à venir qui connaîtront, nous le savons, des mouvements migratoires au centuple. Tout reste cependant à faire, mais tout sera fait si plus nombreux encore nous nous associons aux chantiers, si plus intensément encore nous construisons des histoires d’avenirs radieux, enfin si plus vigoureusement encore, nous écrivons, photographions, filmons, bâtissons, dansons sur les fronts ». Pour en savoir plus et participer à ce projet, c’est ici.
- L’acte 3 de la Marche des solidarités. Ils étaient des milliers, ce samedi 17 octobre, à défiler à Paris, pour réclamer outre la régularisation des sans-papiers, la fermeture des centres de rétention administrative, un « logement pour tous » et un geste du gouvernement pour les travailleuses et travailleurs étrangers, en première ligne pendant la crise sanitaire. Un « acte 4 » est envisagé. A lire, l’article paru dans le journal Le Monde.
Belles échappées
- Pour les spectacles, les réunions, les ateliers du Channel à Calais, il faudra attendre la fin du confinement. Mais une bonne nouvelle concernant la librairie : elle est ouverte pour les retraits de commande du mardi au samedi de 13h à 19h. Pour les commandes 2 adresses : librairieduchannel.fr ou en écrivant à lalibrairie@lechannel.org. Renseignez-vous sur la librairie près de chez vous !
Autres temps de formation et d’échanges
- Les États Généraux des Migrations vous invitent à participer à leur SESSION NATIONALE en visioconférence du samedi 21 au vendredi 27 novembre 2020. Découvrez le programme ! Les inscriptions étant obligatoires, cliquez ici pour accéder au formulaire.
En quête de droit(s) – Outils et infos juridiques
- Barreau de Lille – Permanence téléphonique d’urgence « étrangers 48h » les week-ends, dédiée aux décisions assorties d’un délai de recours contentieux de 48h, dont le délai expire durant les fins de semaine, le samedi ou le dimanche : un.e avocat.e est joignable par téléphone pour aider les personnes étrangères faisant l’objet d’une mesure d’éloignement sans délai ou d’une assignation à résidence à saisir le tribunal administratif de Lille d’un recours. Plus de renseignements sur l’affiche et sur le site de la commission Droit des étrangers.
- Le procès de l’affaire Mawda est fixé les 23 et 24 novembre à Mons. Pour les associations, l’enjeu de ce procès est la question de l’impunité des violences commises par les policiers. Rappel : le 17 mai 2018, une patrouille de la police des autoroutes avait pris en chasse, sur l’autoroute E42, une camionnette suspectée de transporter des personnes exilées qui voulaient rejoindre l’Angleterre. Malgré les injonctions de la police, le chauffeur a refusé de s’arrêter. Un policier a ouvert le feu et le véhicule s’est arrêté à hauteur de Mons. A l’intérieur, une petite fille âgée de deux ans avait été touchée par une balle. Il s’agissait de Mawda, morte sur le coup. Plus d’informations sur le site de rtbf.be.
- L’agence européenne Frontex mise en cause pour des refoulements en mer. Des investigations menées par plusieurs médias dénoncent les pratiques illégales des gardes-frontières grecs, impliquant parfois l’agence européenne de surveillance des frontières. Elles « montrent pour la première fois que les responsables de Frontex sont conscients des pratiques illégales des gardes-frontières grecs – et sont en partie impliqués dans les refoulements eux-mêmes », écrit le Spiegel. Lire l’article du journal Le monde.
Désinfox, outils pour lutter contre les idées reçues
- Que sait-on du lien entre immigration et délinquance ? Interrogé sur plusieurs faits divers de violences et d’agressions survenus durant l’été, Gérald Darmanin déclarait en juillet : « il faut mettre fin à l’ensauvagement d’une partie de la société ». Dans ce contexte, alors que l’actualité politique de septembre 2020 se concentre autour des questions d’insécurité, de délinquance et de criminalité, nombreux sont celles et ceux parmi les politiques à faire explicitement le lien avec l’immigration : la cause de l’augmentation de la délinquance et de la criminalité serait ainsi une conséquence directe de l’immigration “massive” vers la France. Décryptage par l’institut convergences migrations.
Pour comprendre / pour cogiter
- Pour un pacte européen aux côtés des personnes migrantes. « Parce que le « Nouveau Pacte pour la migration et l’asile » proposé par la Commission européenne n’offre aucune perspective pour mettre un terme à l’immigration illégalisée, un autre pacte doit être constitué avec et pour les personnes migrantes, et non à leurs dépens ». A lire cette tribune du journal Libération.
- Des Savoyard.e.s toujours mobilisé.e.s pour défendre les droits des personnes exilées. Dans les Alpes, les associations s’inspirent de l’expérience de Briançon. Lire l’article de Bleuette Dupin de France Bleu Pays de Savoie. L’accompagnatrice en montagne Stéphanie Besson, co-fondatrice de l’association « Tous migrants » raconte dans un livre (« Trouver refuge », aux éditions Glénat), ce que des citoyennes et citoyens font depuis dix ans dans les Hautes-Alpes pour accueillir celles et ceux qui traversent les Alpes.
- Les projets délirants du Royaume-Uni pour tenir à distance les migrants : Les propositions font froid dans le dos. Le 29 septembre dernier, le quotidien Financial Times révélait que Priti Patel, ministre de l’Intérieur britannique, envisageait de construire un centre de traitement des demandes d’asile dans les îles de l’Ascension et de Saint-Hélène, en plein Atlantique sud. Priti Patel s’inspire également du modèle australien, qui « exporte » déjà depuis longtemps les personnes y demandant l’asile sur l’île papouasienne de Manus et à Nauru. A lire l’article de Nejma Brahim sur Médiapart.