La Lettre d'infos n°80

Publié le 13 mars 2024
Sommaire

Infos des lieux de vie


A la frontière franco-britannique


  • Grande Synthe : les obsèques de Rola, 7 ans, noyée le 3 mars en amont du littoral, sur le canal de l’Aa à Watten, ont eu lieu au cimetière de Grande Synthe le 7 mars, rassemblant une centaine de personnes en soutien à la famille. Un reportage du Monde est à trouver ici
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Crédit photo : Le Monde

Le même 3 mars, un homme originaire de Syrie a disparu dans le canal de l’Aa en tentant de rejoindre un bateau. A la suite d'une alerte le jour même aux autorités qui se sont mobilisées autour de recherches qui n’ont duré qu’une heure, les associations et ses proches ont saisi le 12 mars le procureur de Dunkerque pour faire rouvrir une enquête, voir le communiqué de presse interassociatif qui réclame la reprise des recherches.

  • Ouistreham. La tempête Louis a touché le campement le 22 février, endommageant les barnums et autres installations sur le campement. (Sur)vivent sur place une centaine de jeunes hommes début mars. Les associations constatent que la vie en campement et les conditions météorologiques difficiles se répercutent sur la santé des personnes. 

Entre-temps, une menace d’expulsion plane suite au cadastrage de la parcelle par Ports Normands associés. Le syndicat mixte ne parvenait pas à prouver qu'il était propriétaire du terrain sur lequel est le campement dans de précédentes actions en justice.

  • Calais - Les pratiques discriminatoires à l’égard des personnes étrangères se poursuivent dans la ville. Un article de Médiapart qui documente une pratique de “préférence nationale” du 115 : “le dispositif du 115 refuse explicitement de mettre à l’abri les « personnes migrantes » ou « sans papiers ». Une pratique contraire au principe d’égalité et d’inconditionnalité de l’accueil en France.”, article à trouver ici

Voir aussi ce que prévoit la mairie à nouveau pour discriminer l’accès aux bus dans cet article : “En raison d‘une très forte présence de migrants dans le réseau de bus, le syndicat en charge des transports étudie la possibilité de réserver la gratuité uniquement aux seuls habitants du Calaisis.

et ailleurs


  • Grande Maraude. Le samedi 16 mars se tiendra la Grande Maraude Solidaire au col de Montgenèvre (05). Celle-ci prend place dans un contexte de militarisation accrue de la frontière franco-italienne et alors qu’il y a eu trois décès entre les mois d’août et octobre 2023. Toutes les informations sont présentes sur le site de l’association Tous Migrants.
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Infos de la PSM


  • Vous l’avez peut-être déjà vu! Le site internet de la PSM s’est lui aussi refait une beauté et vous pouvez le retrouver sur la même adresse que l’ancien : psmigrants.org. Si vous souhaitez collaborer, écrire, alimenter, vous pouvez envoyer un mail à contact@psmigrants.org
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  • Commission santé mentale. Plusieurs formations auront lieu sur le littoral au mois d’avril : 
    • Formation de formateurs et formatrices aux “premiers secours psy” le 6 avril à Calais. 
    • Formation sur la "gestion d'incidents critiques" le 11 et 12 avril au Monts des Cats.
    • Formation sur la santé mentale et le soutien psychosocial à Caen, le samedi 13 avril.

Infos des assos


  • Fabrique d’Agirs. Les 11, 12 et 13 avril à la Maison d’Entraide et de Ressources à Calais, de nouvelles rencontres auront lieu invitant solidaires, chercheurs, calaisien.ne.s, personnes exilées à se réunir autour de la thématique “Conflits et Résistances”. Au programme : concerts, projections, conférences.
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  • Rando “Les chemins de l’exil” - 3ème édition, organisée par Terre d’errance Norrent Fontes  les 13 et 14 avril à Fléchin (62) ! Les inscriptions et informations sont par ici ou en contactant directement Terre d’errance : contact@terrederrance.com.
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  • Mobilisation. Suite à la menace d’expulsion du campement de Ouistreham, les solidaires se sont mobilisés afin d’appeler à différents rassemblements les 13 et 25 mars. 

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Faire et dire, les personnes premières concernées


  • Témoignage de la famille de Rola, petite de 7 ans, noyée le 3 mars dans le canal de l’Aa à Watten dans le reportage du Monde : « Nous avons vécu trois ans et cinq mois en Grèce et deux ans en Allemagne, à Oldenbourg [Basse-Saxe], confie-t-il. A chaque fois, nos demandes d’asile ont été rejetées et nous avions peur d’être expulsés en Irak. Si l’Allemagne nous avait donné des papiers, ma fille ne serait pas morte. ».
    « Notre sœur était la meilleure à l’école », rapporte le fils aîné, Muhaimen, dans un anglais rudimentaire. « C’est à cause de Dublin que nous ne pouvons pas rester en Europe », poursuit-il, en mimant avec ses mains une prise d’empreintes, comme celle qui permet aux autorités d’un pays européen de savoir si un étranger a déjà été enregistré dans un autre Etat membre. En vertu du règlement européen de Dublin, elles peuvent alors refuser d’instruire sa demande d’asile et l’y transférer. 
    « Nous sommes obligés d’aller en Angleterre, reprend le père, âgé de 42 ans. Si nous demandons l’asile en France, nous serons “dublinés” et renvoyés. »

  • Femmes et migration. A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, le podcast “Migrantes et combattantes” de Charlotte Bienaimé sorti en 2022 donne la parole aux femmes exilées qui représentent 48% des personnes qui ont décidé de migrer. 

Parlons-en : échanges, débats, conférences, formations


  • Non-lieux de l’exil. Cette année, Non-lieux de l'exil est élaboré autour de la thématique “Exil : conflictualité et émancipation” : “Conflictualité, en premier lieu, pour désigner le « heurt avec le pouvoir » (Foucault 1977) des personnes exilées  et les territoires de luttes qui se déploient face aux effets des lois successives pour le contrôle de l’immigration et les politiques assumées de xénophobie sélective (de race, de classe, de genre)tendant à reconduire, pour beaucoup, les formes historiques de la domination coloniale”. Les prochaines rencontres : 
    • 10 avril 2024 – Exil : Art, conflictualité et émancipation | Musique et danse.
    • 15 mai 2024 - Exil : frontières, retours de terrains
    • 5 juin 2024 - Exil : Art, conflictualité et émancipation | Littérature

En quête de droit(s) – Outils et infos juridiques


  • Observatoire des libertés associatives - le réseau de la PSM est invité à participer à une enquête sur les entraves à la solidarité aux 3 frontières, projet en lien avec la Coordination des Acteurs aux Frontières Intérieures. Le projet est à trouver ici. Une proposition de la PSM : vous pouvez directement contacter la chercheuse pour un entretien concernant les entraves que vous vivez, ou que votre associatif/collectif subit (si elle ne vous a pas déjà contacté), OU on peut aussi organiser des ateliers sur le délit de solidarité sur différents territoires, notamment pour faire remonter collectivement ces entraves, en échanger, et se former de nouveau sur la question.

  • Recommandation du Conseil de l’Europe : dans un rapport paru le 22 février 2024, la commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe Dunja Mijatovic appelle à mettre fin à la répression envers les ONG d’aide aux migrant.e.s en Europe, voir ici.

  • Condamnation d’Ibrahima Bah au Royaume-Uni : il a été arrêté en décembre 2022 après que le canot pneumatique qu'il conduisait pour traverser la Manche ait pris l’eau. Quatre hommes se sont noyés et cinq sont toujours portés disparus en mer. Le jury l'a reconnu à l'unanimité coupable d'avoir facilité l'entrée illégale au Royaume-Uni et, à une majorité de 10 contre 2, d'homicide involontaire par négligence grave. Cette condamnation fait suite à un précédent procès, en juillet 2023, au cours duquel le jury n'était pas parvenu à un verdict, mais surtout est une des premières applications de la loi qui criminalise les traversées en petit bateau. Plusieurs ONG qui l’ont soutenu contestent cette décision, notamment Captain Support (voir ici en anglais) qui travaille à soutenir les personnes criminalisées qui “pilotent” les bateaux : les survivants du naufrage s’accordent à dire que Ibrahima Bah était forcé de piloter le bateau surchargé, et surtout qu’il a rapproché l’embarcation qui prenait l’eau vers le bateau de pêche, ce qui a permis de sauver le plus grand monde de personnes.

Pour comprendre / pour cogiter


  • La Serbie et l’invisibilisation des personnes exilées. Expulsions systématiques et de grande ampleur, éloignements des personnes dans le Sud du pays, la Serbie a durci depuis le mois de décembre sa politique envers les personnes exilées. Le podcast de RFI à retrouver ici.

  • Traite des femmes. Cet article d’Afrique XXI revient sur le phénomène de traite des femmes présent dans l'État d’Edo au Nigéria. Il tend aussi à revenir sur certaines projections que l’on se fait autour de ces enjeux :  “La traite sexuelle du Nigeria vers l’Europe n’est pas passée aux mains d’une « mafia africaine » structurée et globalisée. Ces dynamiques d’exploitation relèvent encore majoritairement de petits réseaux communautaires ou familiaux qui n’ont pas forcément de liens entre eux”

  • Fichage. A Strasbourg se trouve le centre opérationnel de l’agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle dénommée “eu-Lisa”, créée en 2011. L’objectif : filtrer et suivre les voyageurs et voyeuses non-européennes ainsi que les personnes migrantes. Selon la directrice de ce centre, il s’agit ici de “remplacer les frontières physiques par des frontières numériques”. L’article de Médiapart ici

  • Frontex. Le gouvernement britannique a signé vendredi 23 février un accord avec Frontex prévoyant un échange d’information, de renseignements  et une coopération accrue sur l’utilisation de technologies telles que le drone. L’objectif affiché est de “mettre à mal les réseaux de passeurs”. Dans le même temps, l’agence européenne triple le nombre de ses agents présents en Bulgarie, pays de transit. Un déploiement de Frontex et un renforcement de la collaboration alors même que “de multiples signaux invitent à conclure qu’au contraire, l’agence Frontex est responsable ou complice de violations des droits des exilés, aux frontières ou dans leurs parcours migratoires” estime Claire Rodier, juriste au Gisti, dans un article publié dans Alternatives économiques.